28ème dimanche du Temps Ordinaire

Bon maître, que dois-je faire pour avoir la vie éternelle en héritage ?

L’empressement du jeune homme pour poser cette question à Jésus exprime la force de son désir, qui peut être le nôtre. Qui d’entre nous – sauf s’il en ignore l’existence et ce qu’elle est – ne désire pas la vie éternelle ? Le Seigneur ne lui reproche d’ailleurs pas sa démarche ; au contraire, elle suscite dans son cœur de pasteur un élan d’amour : Il posa son regard sur lui, et il l’aima. Ne se contentant pas seulement de répondre, Jésus entraîne son élève – et nous avec ! – sur un chemin de maturité spirituelle. Quelques repères…

  1. Personnen’est bon, sinon Dieu seul. Jésus oriente immédiatement la demande du jeune homme vers Dieu. Sa question est donc fondamentalement une question religieuse, et qui engage ! Elle suppose un acte de foi en Dieu, comme étant à la source de la vie en plénitude. Celle-ci ne peut pas se goûter sans ce choix préalable personnel de Dieu, comme une réponse à un amour qui nous dépasse. Dieu est. Le chemin du vrai bonheur commence par cet ancrage fondamental dans le réel.

  2. Tu connais les commandements.Faire le choix de Dieu consiste dans un premier temps à connaître et à aimer ce qu’il a déjà révélé à nos pères, sans inventer autre chose. En tant que Parole de Dieu, les dix commandements sont éternels et donc toujours d’actualité. De cette manière, Jésus montre le lien étroit entre la vie éternelle et l’obéissance à sa Parole, condition de base pour l’amour du prochain. Quand un homme s’est mis à renoncer à commettre [les péchés graves] – et c’est le devoir de tout chrétien de ne pas les commettre – , il commence à relever la tête vers la liberté, explique Saint Augustin, mais ce n’est qu’un commencement de liberté, ce n’est pas la liberté parfaite…

  3. Va, vends, donne, suis-moi.Le jeune homme, face à Jésus, pressent probablement qu’il lui manque encore quelque chose pour une vie en plénitude. L’observance des commandements est le signe pour le maître que l’élève peut faire un pas de plus vers la maturité spirituelle. La vie éternelle ne peut se vivre réellement qu’en quittant, pour mieux s’attacher. Mais quitter quoi ? Pour s’attacher à quoi ? À qui ?

Quitter tout ce qui nous retient loin de Dieu. Le chemin est long car il y a mille choses à quitter: des petits rituels du quotidien (j’ai toujours fait comme ça), l’attache au regard des autres (ne pas oser faire, dire, être soi-même), des sécurités humaines (ce n’est pas comme prévu), des projets personnels (je veux devenir l’homme le plus important du village), des comparaisons inutiles (c’est le chouchou), … sans faire fi de nos biens matériels, choisissant une vie plus simple et sobre, correspondant à notre vocation. Allons-y humblement, pas à pas, animés par l’amour de Dieu et du prochain.

S’attacher à l’essentiel, le Christ. C’est notre amour pour lui qui est à l’origine de notre motivation dans ce chemin de liberté. C’est vers lui que nous allons. La voie, et en même temps le contenu de [la maturité spirituelle] consistent dans la suite du Christ, dans le fait de suivre Jésus après avoir renoncé à ses biens particuliers et à soi-même (Jean-Paul II, Veritatis splendor)

  1. Le silence de Jésus. Il fait partie de ce processus de maturation. Le jeune homme, situé devant ses responsabilités, finit par repartir tout triste, se sentant incapable d’une telle exigence. S’il ne compte que sur lui, il a raison car, sans l’amour de Dieu qui nous précède, c’est impossible. La source, le but et les moyens sont donnés, mais la route est encore longue. La tristesse du jeune homme n’est pas un échec, mais un commencement. Jésus a confiance ; c’est pourquoi, il n’insiste pas, laissant la grâce et le temps faire leur œuvre. Un mouvement de conversion est commencé… cette rencontre avec Jésus sera peut-être décisive pour la suite.

Sans chercher à nous situer précisément dans l’une ou l’autre de ces étapes vers la maturité spirituelle, l’histoire vraie de ce jeune homme riche doit réveiller en nous un réel désir de repartir de l’essentiel, le Christ, et d’orienter toute notre vie vers lui, sans craindre de nous tromper, se souvenant que tout est possible à Dieu!

Don Antoine Storez +, vicaire