« Ah ! Si le Seigneur pouvait faire de tout son peuple un peuple de prophètes ! »
« J’aimerais bien devenir un prophète ! » me dit l’un de vous cette semaine en parlant de cet évangile. C’est bien ce que Jésus attend de nous. Alors comment faire ? Petit manuel.
1. Se décider une bonne fois pour toutes de vivre de foi. Cela veut dire : croire fermement que tout vient de Dieu et que tout doit retourner à lui. Et c’est pousser cette logique jusqu’au bout : celui qui ne vit pas selon la justice et dont le cœur est vide de Dieu est comme un mouton de ce « troupeau parqué pour les enfers et que la mort mène paître » (Ps 48,15). Et il sera tenu pour responsable, au jour du jugement, de ceux qui par sa faute ne seront pas là debout devant le trône de Dieu. Celui qui s’élève vers Dieu élève tous les autres, celui qui vit dans le rejet ou dans l’indifférence de Dieu entraîne de nombreux autres dans sa chute.
2. S’exercer continuellement à voir, à penser, à juger. Dans le Christ ! Saint Paul nous demande d’être des petits enfants pour le mal, mais pas pour le jugement (cf 1 Co 14,20). Le chrétien doit juger. Comme un bon chien qui aboie quand un danger approche. Une parole qui écorne une réputation, une injustice, un péché continu entretenu en secret, un compromis avec les adversaires du Christ ou de l’Eglise, un silence qui permet de condamner un innocent, une loi qui détruit les relations familiales, une désinvolture qui laisse penser aux autres – aux enfants – que Dieu n’a pas d’importance, que la conversion du cœur (la confession) est optionnelle… Le chrétien doit aboyer, c’est à dire signaler le danger, avertir les autres, secouer la somnolence généralisée. Quand il est encore temps.
Nous sommes ardents à réclamer le moindre centime à une administration ou à humilier quelqu’un qui a égratigné notre honneur – mais des vrais mous quand il s’agit de défendre Dieu, son évangile, son Eglise, sa loi, ou de la planter dans les cœurs par le témoignage de la vie et de la parole (ou d’une invitation à Alpha).
Le chrétien ne peut pas être naïf. Il sait que s’il ne s’engage pas de toutes ses forces pour dénoncer le mal, fortifier l’Eglise et bâtir la civilisation de l’amour, les forces du mal auront le dessus. Les chrétiens de salon sont ridicules.
3. Accepter par avance de souffrir par amour pour Jésus. Sortir de l’indifférence par rapport à Dieu, par rapport aux âmes, vivre pour le Christ, conduit nécessairement à souffrir. Peut-on vraiment être de glace à la pensée que des centaines de milliers de baptisés ont rejeté ou sont en passe de rejeter la foi et les traditions de leur baptême par contamination de l’esprit laïcité-télé-canapé ? Ils sont d’ailleurs parfois les premiers à pleurer qu’il n’y ait pas assez de prêtres pour enterrer leur grand-mère, ou pas de chorale à leur mariage, ou qu’on vende l’église de leur village pour en faire un bar à bière. Mais ils ne voient pas qu’ils sont, semaine après semaine, les grands acteurs de cette décadence programmée. « Mais je ne fais rien de mal ! » Certes. Rien de bien non plus. Rien de vraiment bien. Rien qui transmette à la génération future.
Souffrir en prière, pour réclamer longuement à Dieu de faire miséricorde, de changer les cœurs, de ne pas abandonner à leur sort même ceux qui le rejettent. Souffrir parce qu’on se démarque dans une conversation et qu’on dérange ceux qui pensent tous pareil. Souffrir parce qu’on aime les âmes, toutes les âmes, spécialement celles qui marchent sur le large chemin de la perdition (cf Mt 7,13). Souffrir parce que comme Jésus, le seul vrai berger des âmes, on s’enfonce dans les broussailles pour aller chercher, là où elle est, sa brebis perdue (cf Lc 15, 3-7)
Don Guillaume Chevallier + vicaire