Edito du 3ème dimanche de Carême

Si tu savais!

Mardi dernier, la 4e soirée qui réunissait à Nogent le Roi les couples en préparation au mariage cette année portait sur la liberté. D’abord la liberté indispensable pour qu’un homme et une femme se disent un oui plein et solide, mais aussi liberté d’aimer Dieu et de le servir ou de passer à côté, liberté de croire à la Bonne Nouvelle de Jésus ou de courir après d’autres sagesses, liberté d’aimer l’Eglise ou de rester à l’écart… Réactions et discussions intéressantes : pour certains Jésus et l’Eglise semblent mettre des barrières à notre liberté …Or justement Jésus nous libère, et l’Eglise « experte en humanité » nous éduque à cette liberté.

Personne ne forcera quiconque à aimer Jésus ni à le suivre et à vivre selon sa Loi. Et pourtant pour tous ceux qui hésitent, résonne toujours cette phrase de Jésus à la Samaritaine … « Si tu savais le don de Dieu »… Au milieu de ce carême où Jésus a soif de notre amour et de nos actes de conversion, il semble nous demander à boire… Que nous veut-il ? Vient-il avec des reproches ?

Alors, devant tous les hésitants comme devant cette Samaritaine méfiante, Jésus renverse les rôles. « Si tu savais le don de Dieu et qui est celui qui te dit : ‘Donne-moi à boire’, c’est toi qui lui aurais demandé, et il t’aurait donné de l’eau vive. » Jésus se met en face de notre liberté et vient à notre rencontre.

Si tu savais dit Jésus…Tu restes libre de ne rien me demander, de chercher à te débrouiller tout seul ; mais je t’aime sans te demander ton avis, et je donne ma vie en rançon pour toi.

Si tu savais… Je connais toute ta vie et rien ne m’empêche de te regarder encore avec amour. Cette femme découvre que déjà Jésus l’a comprise, qu’il voit son cœur et ses secrets… « Des maris, tu en a eu cinq »… Elle alerte alors tout le village : « Venez voir un homme qui m’a dit tout ce que j’ai fait. Ne serait-il pas le Christ ? »

Si tu savais… Je ne réduis jamais une personne à son péché ; votre péché ce n’est pas votre identité. Ces cinq maris, ou toutes les hontes de vos vies, c’est secondaire pour moi. Mon regard traverse cette carapace pour voir qui vous êtes vraiment. Je ne vois pas une prostituée quand je vois Marie Madeleine, ni un lâche quand je vois Pierre, ni même un débauché corrompu quand je vois Hérode…Tous mes face à face je les gagne par le haut, quand chacun sent qu’il est créé à l’image de Dieu et racheté au prix de mon sang.

Si tu savais encore… Le prix que j’attache à vos efforts ; et à vos devoirs quotidiens et vos épreuves, celles qui vous découragent et celles que vous essayez de traverser avec fidélité et persévérance ; et à vos croix petites et grandes que je veux porter avec la mienne. Rien ne restera sans récompense.

Si tu savais enfin… Je suis à votre disposition dans le sacrement de ma miséricorde pour vous faire revivre. J’envoie mon Esprit-Saint si vous voulez, pour vous inspirer sans cesse et vous porter.

Ces mots, « si tu savais », une maman les a entendus dans son cœur à l’instant où un médecin lui disait la maladie incurable et mortelle de sa petite fille. C’était Anne Dauphine Julliand, qui le raconte dans son livre «  Deux petits pas sur le sable mouillé ». Si tu savais, lui annonçait Dieu, comme je vais mettre ma lumière dans ce sombre drame. Il faut lire son livre pour voir comment la promesse a été tenue.

Nous ne savons pas. Ou bien nous croyons savoir, et trop habitués nous restons à la surface, nous oublions de puiser. Nous aussi cette semaine et pour la suite de ce carême, croyons au don de Dieu plus grand que toutes nos hésitations ; donnons à Jésus nos petits actes, donnons-lui notre carême courageux pour étancher sa soif d’amour… et surtout à notre tour demandons-lui librement son eau vive, sa Parole et sa grâce.

 

Don Enguerrand, †vicaire