Dieu aide
Une chose me frappe dans l’Évangile de ce jour : seul le pauvre reçoit un nom. Le riche, lui, demeure dans
l’anonymat. L’Évangile souligne ainsi une vérité profonde : être, savoir qui on est, d’où on vient et où on
va, comprendre le sens de notre existence est la plus grande des richesses. Avoir un nom, c’est la possibilité de pouvoir entrer véritablement en relation. Néanmoins, cette richesse-là ne s’acquiert pas, elle ne peut que se recevoir. Seule l’âme pauvre sait demander. Le riche consomme, il ne veut, ni ne peut accepter de dépendre. Il n’attend rien de l’autre. A contrario, le pauvre se trouve dans l’obligation de
mendier, et donc il est dans l’attente, dans la réception ; ainsi se rend-il capable de recevoir l’aide d’autrui. D’ailleurs, Lazare signifie en hébreu « Dieu aide », c’est bien sa pauvreté qui lui permet de recevoir ce nom.

On pourrait néanmoins être choqué par cette réflexion et y voir une manière de se rassurer à bon compte.
Finalement, la pauvreté n’est pas si grave et je n’ai rien à faire pour lutter contre. Mais l’Évangile ne décrit pas seulement la pauvreté. Lazare est dans la misère. Si la pauvreté peut être un chemin de liberté, en se détachant des biens qui passent, la misère, elle, déshumanise. Elle réduit à l’extrême besoin, elle écrase au point de faire disparaître l’espérance.
Demeure alors cette question qui s’impose à nous : pourquoi Dieu ne fait-il rien ? C’est là le grand mystère de la foi : ne croyons pas qu’il reste inactif. Dieu est à l’œuvre. Mais sa toute-puissance se heurte (et ceci par l’effet de sa propre volonté) à la résistance de notre liberté ! Dieu ne veut rien faire sans nous. Il attend de ses enfants qu’ils soient ses mains, ses regards, ses instruments de tendresse et de justice.
Laissons donc la parole de Dieu agir en nous ! Dieu aide… alors laissons-le nous aider ! Soyons suffisamment pauvre pour recevoir ce nom de Lazare… pour qu’en recevant le secours divin, nous puissions à notre tour ouvrir les yeux sur les misères qui nous entourent.
Don Louis-Marie DUPORT