C’était pour que les œuvres de Dieu se manifeste en lui. (Jn 4, 3)
Né sans bras ni jambe, Nicky, atteint de la maladie très rare « tetra-amelia », est bouleversé par ce verset, et comprend peu à peu que Dieu peut transformer sa faiblesse en force de témoignage pour le monde. Aujourd’hui, il est pasteur protestant et prêche l’amour fou de Dieu donnant des conférences dans des églises, des lycées et des universités des cinq continents.
Nous ne sommes peut-être pas nés aveugles comme l’homme dans l’Evangile, ou porteurs du syndrome tetra-amélie comme Nicky, mais nous faisons aussi l’expérience, de façon plus ou moins radicale, de nos pauvretés. Pauvretés physiques, relationnelles, spirituelles, intellectuelles… Faut-il donc se satisfaire de nos pauvretés pour que l’œuvre de Dieu se manifeste davantage ? Oui et non.
Oui, pour une part, pour cette ultime raison qui donne du sens à toute notre vie : rendre gloire à Dieu. L’expérience de notre pauvreté nous aide à nous vider de nous-mêmes pour être riches des dons de Dieu, goûter à sa joie et en témoigner. C’est l’expérience à la fois profonde et douloureuse du peuple Hébreu dans le désert. Guidé par Moïse, Israël comprend peu à peu que Dieu l’accompagne constamment en le délivrant de l’adversaire, en le nourrissant de la manne et en l’abreuvant de l’eau du rocher. Dans sa pauvreté, il devient beaucoup plus sensible à l’action de la Providence immergée dans le concret de son existence, et trouve dans cette proximité de Dieu une joie authentique et profonde.
L’aveugle de l’Evangile, quant à lui, a appris dans sa cécité, en consentant peu à peu à sa faiblesse radicale, à être dépendant des autres et de Dieu. C’est ce long apprentissage dans l’obscurité et le secret du cœur, qui lui permet d’obéir avec autant de simplicité aux paroles du maître et d’être libre des regards curieux et soupçonneux des voisins et des pharisiens. Au moment opportun, Jésus le guérit. L’aveugle en devient le disciple et le témoin.
Non, pour une autre part, car la vie chrétienne ne consiste pas à se complaire dans une vie médiocre.Dieu vomit les tièdes rappelle avec force le livre de l’Apocalypse (Ap 3, 16) ! Il y a en nous le désir d’être vainqueur de nos pauvretés qui sont aussi une marque visible du péché des origines. La vie chrétienne ne consiste pas à être complètement indifférent aux œuvres et même à son propre salut en refusant d’être dans une constante dynamique de conversion. Comme pour l’aveugle de l’Evangile, Dieu attend notre obéissance active (va te laver à la piscine de Siloé), des décisions audacieuses, et notre libre adhésion par la foi pour marcher à sa suite (Crois-tu au Fils de l’homme ?).
Oui et non, voilà bien une réponse passe-partout ! Elle manifeste cependant le paradoxe de notre vie chrétienne qui consiste tout à la fois à agir et à se laissant faire. Mais un grand critère demeure : aimer Dieu ! Quand les hommes aiment Dieu, lui-même fait tout contribuer à leur bien, puisqu’ils sont appelés selon le dessein de son amour (Rm 8, 28)… et ainsi la gloire de Dieu se manifeste !
Don Antoine Storez, + vicaire