Édito du 30e dimanche du temps ordinaire

30to« Je n’ai plus qu’à recevoir la couronne de justice »

Qui parmi nous n’est pas sensible à la juste rétribution de son travail, à la récompense d’un service rendu ou aux remboursements de ses prêts ? Ne dit-on pas les bons comptes font les bons amis ? Quand quelqu’un abuse de notre bonté, cela nous touche et nous blesse. Quand nous sommes témoins d’une injustice, cela nous révolte.

Ce qui est vrai sur le plan humain l’est aussi sur le plan spirituel, dans notre relation à Dieu. Parfois, l’apparente injustice de celui que Ben Sira le Sage nomme le juge impartial [qui] ne défavorise pas le pauvre [et] écoute la prière de l’opprimé (1ère lecture) ou Saint Paul le juste juge (2ème lecture) nous déstabilise et peut nous rendre tristes. Face au décès brutal d’un être cher, un mauvais diagnostic médical ou tout simplement un malheureux concours de circonstances, Dieu peut nous sembler injuste. Comment comprendre cette apparente injustice de Dieu ?

Un chemin de conversion

Aucune réponse humaine ne peut être satisfaisante à la question essentielle de la souffrance. Quand elle n’est pas la conséquence directe d’un mal que nous avons nous-mêmes commis, elle est toujours humainement injuste. Pourtant, Dieu n’abandonne pas celui qui cherche avec ardeur le bien. Les textes de ce dimanche, comme bien d’autres passages de l’Écriture, nous le rappellent : Celui dont le service est agréable à Dieu sera bien accueilli, sa supplication parviendra jusqu’au ciel. La souffrance nous oblige à transformer notre manière de concevoir la réalité, nous appelle à grandir en maturité. Elle devient ainsi l’occasion d’une conversion plus profonde du cœur : une plus grande confiance en Dieu, une plus grande persévérance dans la prière, une vie théologale plus ferme.

La souffrance vaincue par l’amour

Pour être en mesure de mieux percevoir la réponse au « pourquoi » de l’apparente injustice de Dieu, il nous faut aussi tourner nos regards vers la croix du Christ. Par le don de son propre Fils, Dieu nous répond que la souffrance peut être offerte et féconde pour d’autres et ainsi être vaincue par l’amour. A l’instar de Saint Paul dans la deuxième lecture, nous sommes nous aussi invités à unir nos souffrances à celles du Christ en croix, par amour, pour participer au plan de salut de Dieu et à la gloire du Christ ressuscité : Le Seigneur me sauvera et me fera entrer dans son Royaume céleste. Cette union amoureuse et féconde au mystère pascal du Christ, en réalité, s’expérimente par la foi plus qu’elle ne s’explique.

Non, Dieu n’est pas injuste. Il n’est pas insensible à nos efforts et nos douleurs. Dieu est toujours dans le camp de ceux qui souffrent disait St Jean-Paul II. Le juste juge nous promet une récompense extraordinaire dont nous pouvons déjà goûter les prémices ici-bas : le bonheur d’être plus proche de Dieu et d’être mystérieusement fécond, l’espérance joyeuse d’une récompense infiniment plus belle que ce que nous pouvons demander ou même concevoir (Ep 3, 20).

Don Antoine, † vicaire