Edito du 4ème dimanche de Carême

« Dans le Seigneur, vous êtes lumière » (Eph 5,8)

L’ensemble de la Bible est riche en allusions à la lumière et aux ténèbres, on a régulièrement mention de l’opposition qu’il y a entre les deux, du contraste souligné par cette réalité dont nous faisons l’expérience tous les jours. Plus que cela, au tout début du livre de la Genèse, nous avons le récit de la création progressive que Dieu opère, et la lumière en est justement le premier élément : « La terre était informe et vide, les ténèbres étaient au-dessus de l’abîme et le souffle de Dieu planait au-dessus des eaux. Dieu dit : « Que la lumière soit. » Et la lumière fut. Dieu vit que la lumière était bonne, et Dieu sépara la lumière des ténèbres. Dieu appela la lumière « jour », et il appela les ténèbres « nuit ». Il y eu un soir, il y eut un matin : premier jour. » (Gn 1, 2-5). 

Si le monde s’ouvre par la lumière, combien plus la vie de chaque homme trouve dans la lumière la dynamique d’un chemin d’épanouissement et de joie. L’aveugle est alors bien loin de pouvoir partager cette dimension, spécialement pour celui qui l’est de naissance, comme cet homme sur le chemin de Jésus. C’est vrai qu’il ne connaît pas cette lumière par la vue, par ce sens dont il est privé. Mais n’y-t-il pas d’autres manières d’être dans la lumière ? A l’opposé, des personnes bien voyantes peuvent peut-être aussi vivre dans les ténèbres.

Nous pouvons alors considérer que la lumière peut venir de deux sources différentes : une extérieure, l’autre intérieure.

Laissant de coté toute réalité de la physique pour rester sur le plan spirituel, nous sommes éclairés de l’extérieur par ce qui arrive jusqu’à nous. La source est double : cela passe par la Révélation qui vient éclairer notre connaissance et notre appréhension de Dieu. Sans le Christ, nous serions encore ce peuple qui marche dans les ténèbres, c’est-à-dire avec une perception trop réduite de ce que la vie nous réserve, et surtout du réel sens de celle-ci. L’autre source extérieure passe par les instruments dont Dieu se sert pour nous faire entrer dans sa lumière, c’est-à-dire principalement ceux qui nous entourent par la charité.

Mais la source est aussi intérieure dans la mesure où il faut arriver à poser un regard de lumière sur ce qui nous entoure. C’est peut-être les vertus d’espérance, de foi et de charité qui sont l’énergie nourrissante de cette source. L’espérance nous permet de viser une lumière toujours plus intense, la foi nous fait prendre conscience que nous sommes porteurs de la lumière qui est Dieu, la charité nous oblige à être rayonnants de lumière pour les autres.
Ce qui viendrait le plus ternir notre lueur, c’est bien le péché, à commencer par le péché d’orgueil qui trouble notre appréhension de cette lumière, intérieure comme extérieure. Le péché nous empêche de voir Dieu se révélant pour nous parce que nous nous suffisons à nous-mêmes, il fausse notre regard sur notre entourage nous poussant plus à des jugements qu’à l’appréciation de l’autre. Notre péché ternit aussi notre cœur, réduisant l’efficacité des trois vertus théologales : « Ne prenez aucune part aux activités des ténèbres, elles ne produisent rien de bon ; démasquez-les plutôt » (Eph 5).

Pour aller encore plus loin, saint Paul ne nous indique pas les sources de lumière, mais il nous dit « Maintenant, dans le Seigneur, vous êtes lumière ». La source de lumière qui est Dieu se confond dans notre âme pour que nous soyons nous-mêmes cette lumière. Nous Chrétiens, nous avons une responsabilité toute particulière en marchant vers Pâques, vers la lumière de la Résurrection, puisque nous avançons en étant déjà illuminés par la grâce. Puissions-nous en témoigner dans notre monde où les ténèbres envahissent trop souvent les cœurs.

Don Hugues, †curé