« Voici ce que je vous commande » (Jn 15)
« Voici ce que je vous commande : c’est de vous aimer les uns les autres » (Jn 15,17). Dieu a beaucoup de désirs pour nous, il souhaite véritablement que nous soyons sur ce chemin de sainteté qui nous fera goûter sa gloire dans une contemplation éternelle. Mais Dieu ne nous commande pas d’être saint. Par contre, il nous commande de prendre les bons moyens pour y arriver, à commencer en nous commandant d’aimer. On peut voir l’amour comme un sentiment qui s’impose à nous, de manière positive ou négative, pour lequel nous n’avons pas une grande maîtrise, ce n’est pas créé par la volonté. Nous aimons ou nous n’aimons pas, c’est notre cœur qui nous le dit. Alors comment quelqu’un peut-il commander d’aimer ? L’amour peut-il se commander ? Si Dieu ose le faire, c’est que c’est possible, mais il nous faut alors apprendre à aimer à la manière de Dieu.
Le pape Benoît XVI pose la question dans l’encyclique « Deus Caritas est » (25 déc. 2005). Voilà la premier élément de réponse qu’il nous donne : « Le premier, il nous a aimés et il continue à nous aimer le premier; c’est pourquoi, nous aussi, nous pouvons répondre par l’amour. Dieu ne nous prescrit pas un sentiment que nous ne pouvons pas susciter en nous-mêmes. Il nous aime, il nous fait voir son amour et nous pouvons l’éprouver, et à partir de cet «amour premier de Dieu», en réponse, l’amour peut aussi jaillir en nous » (n°17). Il apparaît donc que l’amour n’est pas seulement un sentiment qui va et qui vient. « Le sentiment peut être une merveilleuse étincelle initiale, mais il n’est pas la totalité de l’amour » (n°17). Pour parler de commandement, il faut qu’intervienne la volonté. « La rencontre des manifestations visibles de l’amour de Dieu peut susciter en nous un sentiment de joie, qui naît de l’expérience d’être aimé. Mais cette rencontre requiert aussi notre volonté et notre intelligence. La reconnaissance du Dieu vivant est une route vers l’amour, et le oui de notre volonté à la sienne unit intelligence, volonté et sentiment dans l’acte totalisant de l’amour. Ce processus demeure cependant constamment en mouvement: l’amour n’est jamais ‘achevé’ ni complet ; il se transforme au cours de l’existence, il mûrit et c’est justement pour cela qu’il demeure fidèle à lui-même » (n°17).
L’amour du prochain se révèle ainsi possible au sens défini par la Bible, par Jésus. « Cela ne peut se réaliser qu’à partir de la rencontre intime avec Dieu, une rencontre qui est devenue communion de volonté pour aller jusqu’à toucher le sentiment. J’apprends alors à regarder cette autre personne non plus seulement avec mes yeux et mes sentiments, mais selon la perspective de Jésus Christ. Son ami est mon ami. (…) Ainsi, il n’est plus question d’un ‘commandement’ qui nous prescrit l’impossible de l’extérieur, mais au contraire d’une expérience de l’amour, donnée de l’intérieur, un amour qui, de par sa nature, doit par la suite être partagé avec d’autres » (n°18).
Don Hugues Mathieu + curé