« Une dernière fois, mêlez-vous de vos affaires! »
Ce sont les menaces que reçoit Tintin, sur la piste des méchants de tout poil. C’est souvent aussi notre idée d’une vie paisible en famille, entre collègues, en société… « Chacun chez soi »… Encore plus sur le sujet religieux qui est, dit-on, « du domaine privé ».
Mais voici que l’Ecriture de ce dimanche multiplie les appels à nous sentir concernés par ceux qui s’égarent autour de nous, à aller vers les autres pour leur parler de « leurs affaires », à les alerter par amitié. « Je fais de toi un guetteur »… Et si tu restes muet devant l’injustice d’un frère, « lui, le méchant, mourra de son péché, mais à toi, je demanderai compte de son sang. »
Cela nous bouscule. C’est vrai qu’il existe une façon de redresser les torts qui est nuisible et qui n’est pas chrétienne. Mais sans tomber dans ce piège, un vrai chrétien a souvent besoin d’audace pour « dire franchement du mal du mal », et si possible le dire à la personne qui pourrait l’écouter et changer quelque chose. Le dire avec douceur et « par en-dessous », sur la pointe des pieds, mais le dire quand même. Jésus en a montré l’exemple jusqu’à en mourir : « ne pêche plus… », « convertissez-vous ».
C’est que nous sommes responsables les uns des autres. Tout en veillant à rester « à notre place, toute notre place et rien que notre place… », reconnaissons que nous sommes tous liés par le bien commun, et même par ce qu’on appelle la communion des saints : « toute âme qui s’élève élève le monde, toute âme qui s’abaisse abaisse le monde ». Donc que chacun veille sur les autres, à plus forte raison ceux qui exercent une part d’autorité.
Et il y a bien des façons de veiller sur les autres. En cette rentrée beaucoup d’entre nous vont recevoir une lettre de mission, reconnaissance d’un appel à servir l’Eglise dans nos paroisses : catéchistes, accompagnateurs, services liturgiques, services et conseils paroissiaux, et bien d’autres. Nous avons une responsabilité commune, donc certains laïcs sont « appelés de diverses manières à apporter une collaboration plus immédiate à l’apostolat de la hiérarchie (à travers) l’exercice de certaines fonctions ecclésiastiques à finalité spirituelle. », le concile Vatican II (LG 31-34). Mais il rappelle aussi que tous ont avant tout une vocation première, qui peut prendre bien d’autres formes : « chercher le Royaume de Dieu en gérant les affaires temporelles et en les ordonnant selon Dieu » et « contribuer, en qualité de membres vivants, à la croissance de l’Eglise et à sa sanctification permanente …. rendre l’Eglise présente et agissante dans les lieux et les situations où elle ne peut être le sel de la terre que par eux. » Autrement dit être chrétien à fond, aussi en dehors des œuvres d’Eglise.
Que les missions confiées à certains rappellent donc à tous, leur place indispensable comme disciples missionnaires là où ils vivent, dans leur famille, leur milieu de travail ou dans la société.
Don Enguerrand de Lorgeril, †vicaire