Un Carême dans l’espérance
L’an dernier, un chiffre remarquable avait fait beaucoup parler : on enregistrait une hausse de 30 % de baptisés adultes dans la nuit de Pâques par rapport à l’année passée. La tendance n’a pas changé : dans toute la France, on remarque une croissance du nombre d’adultes demandant le baptême, ce qui se vérifie dans notre paroisse.
L’an dernier encore, une remarque généralisée à travers toutes les paroisses de notre pays : on avait partout observé une assistance nombreuse à la messe des Cendres. C’était encore le cas cette année, en particulier chez nous. Il y avait notamment de nombreux jeunes, dont beaucoup venaient pour la première fois. Le fait peut paraître surprenant : après tout, la messe des Cendres n’est pas la messe la plus attirante de l’année, non ? D’où viennent ces jeunes, qu’est-ce qui les pousse à vouloir « faire le Carême » ?
Je ne crois pas pouvoir apporter à cette question une réponse définitive – il y a certainement plusieurs facteurs. Il semble évident que la présence visible d’un islam pratiquant entraîne ceux qui se sentent plutôt chrétiens à se réapproprier leur foi et leur pratique. Il y a également sur les réseaux un grand nombre d’influenceurs chrétiens qui, souvent hors de tout cadre institutionnel, mettent en valeur des éléments de pratique chrétienne, tout spécialement pour le Carême. Mais cela ne servirait à rien s’il n’y avait d’abord
au cœur de ces jeunes, collégiens, lycéens, étudiants et jeunes professionnels, un appel de Dieu qui les met en mouvement.
Bien sûr, il ne s’agit pas de faire preuve d’un optimisme exagéré qui oublierait le réel. En France, le nombre de catholiques continue de baisser, ainsi que la place de l’Eglise, souvent oubliée, ou décrédibilisée à cause des scandales qui la secouent. Pourtant, ces signes montrent un frémissement qu’il serait coupable de dédaigner. Ils ne sont peut-être pas la majorité de leur génération, mais ils sont nombreux, ces
jeunes qui veulent entendre l’appel de Dieu, qui veulent approfondir ou même découvrir la foi, qui veulent parler du Christ autour d’eux. Je crois également que l’idée de pénitence (c’est à dire revenir vers Dieu par amour pour lui, parce que nous sommes peinés de l’avoir offensé) parle à leur cœur, bien plus peut-être qu’à celui d’autres générations.
Il ne s’agit pas pour nous d’optimisme, à portée humaine, mais d’espérance. L’espérance vient de Dieu et va
vers Dieu. Ici, ces jeunes qui débarquent viennent en dehors de tous nos plans pastoraux et missionnaires. Il s’agit donc d’abord pour nous d’accueillir ce don qu’ils représentent, même et surtout s’ils dérangent nos
habitudes (« ils ne connaissent pas la foi » ; « ils veulent pratiquer comme des musulmans » ; « ils s’intéressent
uniquement à la pratique extérieure et pas au service des autres » ; et autres généralisations désobligeantes). Dieu nous parle à travers ces personnes qui viennent, qui ont soif et qui veulent agir pour lui. Si l’on accueille réellement ces personnes, alors nous serons à même de nous réjouir, même si nous sommes déstabilisés ; et nous pourrons alors convertir notre regard grâce à l’espérance. C’est elle qui nous fait compter sur Dieu et non sur nos forces déclinantes, c’est elle qui nous fait désirer le Royaume de
Dieu et nous pousse à l’annoncer.
Le pape François a choisi l’espérance comme thème du jubilé de 2025. Qu’elle nous guide tout au long de ce Carême qui vient de commencer, en nous aidant à recevoir le don de Dieu et à nous mettre à son service : bon Carême à tous !
Don François Doussau + prêtre